Découvrez les coulisses

de la création de Mad

Retour sur un premier roman

À l’occasion de la réédition en version numérique de mon premier roman « Mad », j’avais envie de revenir avec vous sur l’aventure qu’a consisté ce premier livre.

Depuis mon adolescence, j’écris des histoires avec l’espoir d’inspirer des changements dans le monde. Je me suis toujours senti touché par les injustices et j’ai développé tôt le besoin de m’engager. Je me souviens encore du premier sitting que j’ai provoqué à 14 ans pour participer à une grève étudiante, des pétitions que je faisais signer et des t-shirts que je vendais pour Greenpeace. Et j’ai très vite eu l’intuition qu’en écrivant je pouvais inventer un autre regard sur la réalité. J’ai écrit des premières pièces de théâtre aux titres évocateurs « Microcosme éthique », « Génération caoutchouc »… mais enflammé par mes belles idées, je ne parvenais pas à rencontrer le succès et pire je passais souvent pour un donneur de leçons. Et dire qu’on m’avait conseillé de devenir enseignant, un comble !

Puis, j’ai moi-même expérimenté de nombreux changements dans ma propre vie : j’ai quitté l’enseignement pour fonder une compagnie de théâtre jeune public, je suis devenu papa, j’ai animé des ateliers d’écriture, travaillé en bibliothèque… pour enfin me lancer dans la voie dont je rêvais depuis le début : être écrivain ! Quand on est créatif et fidèle à ses valeurs, se réinventer est possible, même si c’est une course d’obstacles ! Cette expérience, je voulais en témoigner dans mes livres.

J’ai alors eu la chance de croiser, dans l’atelier d’artistes que j’animais à Liège, Geneviève, une plasticienne qui m’a raconté son parcours, son exaspération face au milieu de l’art et sa récente folie : acheter une maison isolée pour s’y retirer. Je n’ai plus jamais revu Geneviève mais son témoignage m’est resté : je tenais là le point de départ à l’histoire que je voulais écrire, quelqu’un qui a des rêves et qui envoie balader toutes les contraintes pour les réaliser.

Je tenais une idée. Il me fallait la densifier et lui donner de la chaire. Et c’est un autre artiste qui m’a inspiré. En sortant du film « Les Géants » de Bouli Lanners dont le rapport à la nature et à la liberté m’avait bouleversé, j’ai traversé la rue pour acheter un carnet à la librairie d’en face et j’ai écrit les premières scènes de « Mad », une femme qui se lance dans un retour à la campagne sans avoir aucune idée des conséquences et des difficultés que cela représente mais qui sait que c’est une nécessité pour rester elle-même et ne pas sombrer dans l’aigreur.

À l’époque, j’avais encore un boulot alimentaire principal et j’ai dû jongler avec les horaires et les activités familiales pour trouver le temps d’écrire. J’avais une assez longue pratique de l’écriture mais jamais sur des projets aussi ambitieux. J’avais déjà changé plusieurs fois de métier mais encore jamais eu la folie de tout abandonner juste pour l’écriture. Alors pendant un an, j’ai grappillé des heures un peu chaque jour, quelques week-ends en solitaire pour créer une structure très scénarisée, avec le plus de poésie possible.

Mad était à la fois un concentré de mes valeurs et le premier personnage principal aussi différent de moi ! Je voulais tout savoir d’elle, j’avais tant à lui faire vivre, tant à apprendre. Je voulais être comme elle : un idéaliste qui se frotte à la réalité, un citadin à la campagne. Cela m’a amené à me documenter et à vivre de belles expériences dont je vous parle ci-dessous !

La nature dans tous ses états

Je vous ai raconté ci-dessus comment l’idée de Mad était née. Mais je vous ai peu dit de quoi ce roman parlait.

Madeleine est une artiste de 53 ans qui vit en ville, qui a réussi mais qui ne sent pas à sa place. Dans ce monde d’apparence, elle cherche du sens. Quand on lui parle de succès et d’argent, elle s’enfuit en courant. Elle préférerait vivre d’amour. Elle se sent différente, un peu folle. Son diminutif de « Mad » lui colle à la peau. Alors, dépitée et en colère, elle plaque tout pour se réfugier à la campagne.

Je vous l’avouais déjà précédemment, il y a beaucoup de moi en Mad. Je m’intéresse à l’art et à l’amour avant la reconnaissance et l’argent. Je voudrais tant réconcilier ces notions et je me sens en colère quand la majorité de la société va dans l’autre sens. Je me suis souvent senti à part. Alors pour ne devenir ni fou ni dépité, j’écris et je réponds tant que je peux à l’appel de la nature.

J’ai grandi dans une campagne aseptisée où vivaient plus de chômeurs et d’employés que de fermiers. Et, la seule ferme du coin, je ne lui connaissais comme activités que la vente d’œufs et l’épandage de pesticides qui obligeait à fermer les fenêtres de la maison. Je voulais que Mad soit confrontée à cela : un monde inconnu et hostile, là où elle espérait un paradis perdu. Et je suis allé en repérage plusieurs jours dans une ferme pour observer ce que mon personnage allait découvrir : la traite des vaches, la fabrication du fromage et la rudesse de la vie quotidienne.

Ce fut un choc pour moi comme pour elle. Ce métier est ingrat, dévalorisé et soumis aux mêmes contraintes que ceux des villes : la course à la technologie et à la rentabilité. À mes yeux, ce n’est pas pour rien si on parle d’exploitation agricole. La terre et les bêtes y sont pressées et contraintes, même si le moteur premier est encore l’amour de la nature. Ce dilemme, c’est celui que vit le personnage de Jean, le fermier dont Mad deviendra la voisine (et plus si affinités !).

J’aime aussi depuis longtemps les longues balades en forêt. Savoir que de grands animaux sauvages y vivent invisibles à nos yeux me fascine. Je me souviens d’une scène cocasse où avec des amis nous nous étions mis en quête d’observer des sangliers et où après une longue attente tout le monde avait pu admirer une famille passer au trot, sauf moi qui avais entrepris d’escalader un promontoire pour mieux les voir arriver ! Raté ! Alors, j’ai installé Mad à l’orée des bois et je l’ai poussée à les explorer pour le pire et le meilleur.

Parce que par chez nous, il n’y a plus beaucoup de forêts où on est vraiment seul. C’est aussi un terrain de jeu pour plein de personnes, dont les amateurs de moteurs vrombissants et de boue. Comment Mad pouvait-elle cohabiter avec des quads ? Et c’est le rendez-vous des chasseurs. Comment Mad pouvait-elle ignorer cela ? Comment, elle qui déteste la violence, allait-elle gérer sa colère face à ces agresseurs ? Ça, c’était le défi que je lançais à l’auteur engagé que je veux être !

L’acte créatif est un excellent moyen de partager des émotions, d’apprendre à les reconnaître, d’en avoir conscience. Je voulais que Mad ait cette corde à son arc. Alors, parce qu’elle se débat avec son monde intérieur, parce que je voulais qu’elle exerce un autre art que moi et parce que je cherchais quelque chose de très visuel (le cinéma de Bouli Lanners était toujours dans un coin de ma tête quand j’écrivais), j’ai choisi qu’elle soit peintre. J’ai beaucoup d’amis dessinateurs, j’adore leur capacité à donner formes à des mondes. Mad leur doit ce don et dessine la nature et les humains dans leur plus simple appareil.

J’avais lu cette idée séduisante chez Nancy Huston qui fait le pari que si les adolescents avaient des cours de croquis nus mixtes à l’école, les hommes et les femmes se connaîtraient mieux. Alors je lui ai écrit pour lui demander l’autorisation d’utiliser cette idée dans mon roman. Elle a eu la gentillesse de me répondre et l’intelligence de m’encourager : les scientifiques doivent tenir compte des idées des autres, les écrivains doivent s’en inspirer et se les approprier. J’ai donc foncé ! Je ne vous révèle pas comment j’ai intégré ce concept à mon roman : j’espère vous avoir donné envie de le découvrir par vous-même !

Un roman inspirant ne meurt jamais

Quatre ans après la sortie papier de Mad (pour moi, c’était hier) j’ai encore envie de vous en parler pour vous transmettre l’énergie qui continue à m’animer.


Mon manuscrit terminé, je l’ai envoyé comme je l’avais fait pour d’autres avant lui à toutes les grands éditeurs français. Et j’ai à nouveau collectionné les lettres de refus. Moi qui voulais partager mon histoire avec des lecteurs proches, je me retrouvais à devoir convaincre des inconnus éloignés de mes thématiques. Comment y parvenir alors que ces comités de lecture sont submergés de milliers de sollicitations chaque année et que les nouveaux auteurs ne sont qu’une minorité de ceux qui sont édités ?


« Penser global et agir local » est un slogan qui m’a toujours parlé. Puisque je voulais avoir des lecteurs que je pouvais rencontrer, je me suis intéressé aux petites maisons d’édition belges à qui j’ai aussi adressé mon manuscrit. Et c’est celle qui était située la plus près de chez moi qui m’a répondu la première. « Mad » avait plu à Françoise Salmon des éditions Murmure des Soirs, qui se reconnaissait dans ce parcours de femme libre et m’invitait à prendre un café le lendemain à Liège pour faire connaissance.


Une belle aventure éditoriale a alors commencé en compagnie de Thierry Detienne qui m’a épaulé pour le travail de relecture et de correction du manuscrit final. Une petite équipe m’entourait pour mettre au jour mon premier livre et lui permettre de rencontrer un premier public. J’avais plein d’idées, plein d’envies. La fête de sortie fut un beau succès où plusieurs dizaines de personnes se sont pressées pour découvrir le livre et déguster les crêpes que nous leur avions préparées (plus tard, en ouvrant le bouquin, ils comprendraient que c’est une spécialité de Mad).


Il y eut plusieurs rencontres en bibliothèque (je travaillais toujours dans le secteur à l’époque) dont un débat mémorable avec des agriculteurs bios qui étaient venus témoigner et apporter leur éclairage sur la réalité que je dépeins dans le roman. Les retours de mes lecteurs et surtout de mes lectrices étaient nombreux et magnifiques. Mais j'ai obtenu peu d’échos dans la presse et en dehors de mon cercle ou de celui de Murmure des soirs. Comment faire entendre sa voix dans ce monde de brouhaha ?


J’ai continué à écrire et à éditer des romans : « Femmes de Rops », « Buiten ». Puis j’ai eu la chance d’intégrer comme scénariste l’équipe de la collection sport de Dupuis et de connaître en BD un premier succès populaire. J’avais de plus en plus de lecteurs, toujours dans ma région et pour des moments éphémères. Mais mon village, c'est celui de celles et ceux qui rêvent comme Mad d'un monde meilleur ! Et je ne compte pas laisser disparaître mes romans tant qu'ils n'auront pas fait le tour de la planète des rêveurs !


Alors depuis plus de deux ans maintenant, j’ai pris la décision la plus importante de ma vie : j’ai démissionné de mon emploi salarié pour me consacrer à plein temps à mon métier d’écrivain. Et j’ai choisi de me professionnaliser en m’inscrivant notamment à une formation en ligne pour découvrir les rouages de l’édition en ligne.


Tout ce qui a fait que « Mad » a plu à mes premiers lecteurs — le retour à la nature, le changement de vie, le souffle de liberté — tous ces thèmes parlent à énormément de gens à travers le monde. Et internet me permet aujourd’hui de les toucher. Alors, je fais le pari que Mad a encore beaucoup de choses à souffler à l’oreille de personnes que je ne connais pas. La période du confinement m’a montré que beaucoup se servent du net pour chercher à rester en contact, à se réinventer, à s’inspirer. Et en déconfinement, je sens cette volonté de soutenir les artistes, d’oser leur acheter directement des œuvres, au prix juste, pour qu’ils puissent vivre de leur création.


Voilà pourquoi, avec le soutien de Murmure des soirs, je redonne un deuxième souffle à Mad et je vous le propose moi-même à la vente en numérique, avec un avantage exceptionnel pendant 15 jours si vous vous le procurez via mon intermédiaire plutôt que sur les plateformes de vente en ligne. En tant qu’auteur, je mets ainsi en œuvre de quoi prendre ma liberté professionnelle et donner la chance à mon premier personnage de toucher un cercle bien plus large de lectrices et lecteurs à inspirer.


Je vous ai beaucoup parlé de moi et de mes espoirs dans ces coulisses de ma création. Je retourne sur la pointe des pieds à mon écriture et je vous laisse avec Mad qui reprendra la parole pour moi, pour une sacrée renaissance numérique dont j’espère vous avoir convaincu.es d’être les parrains et les marraines !

Découvrez ce roman inspirant dès maintenant !